Résumé
Pierre Assouline met en scène, sous nos yeux, le travail d'Henri Cartier-Bresson (entre photographies, films d'actualités et reportages), tandis que la voix off du photographe le commente.
Avis
Sur des photographies et des planches du photographe, le réalisateur balade sa caméra, zoome, voyage à la recherche d’un détail, tandis que Cartier-Bresson les commente et raconte son travail. Les photographies traversent l’écran, la plupart en noir et blanc. Quelques films d’informations tournés pour le cinéma, quelques reportages réalisés par Henri Cartier-Bresson lui-même s’insèrent dans ce ballet. Et, rarement dans l’écran construit en split-screen, le photographe apparaît de dos, face à sa fenêtre, à côté de ses photographies mises en regard dans le cadre. Se figure alors l’origine de cette voix presque omniprésente tout au long du documentaire. Pierre Assouline remonte le temps, les études, les voyages, feuillette à travers les photos toute une vie que l’homme commente rapidement, parfois même avec une certaine désinvolture, comme si se raconter ne l’intéressait pas. Sur son travail de photographe, Cartier-Bresson est plus prolixe, interrogeant son art à l’aune de questions techniques, éthiques et philosophiques avec beaucoup de simplicité. Dans l’objet construit à l’écran, entre les photographies qui défilent et la voix du photographe, se reforme un peu artificiellement cette division entre l’appareil photo, prolongement de l’œil, et l’objet du regard, ce qu’il capture, arrache à l’éternité dans l’instant immédiat. Et cette passion de la photographie, cette joie de l’instant présent, Cartier-Bresson - qui se définit comme un libertaire - la porte en bandoulière comme une philosophie de vie. Quant à sa parole, elle vient flotter sur les photographies comme des bouts de pensée, sortes d’éclats isolés d'un discours plus rationnel. Il ne s’agit pas là de saisir tout un témoignage ni même un discours articulé, mais d’arracher aussi quelques pensées, notions, paroles au discours, de la même manière que sur le temps du monde, la photographie témoigne de moments. Avec une certaine sobriété, 'Le Siècle de Cartier-Bresson' réussit à rejoindre l’univers du photographe qu’il nous dévoile et à nous faire mesurer toute la beauté de son œil toujours sur le vif, impatient, jouisseur et dévoreur, témoin de son temps donc.